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Faunes & Flore
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Faunes & Flore
14 mai 2014

Au bonheur des hommes

Il était là.

Je ne le connaissais pas mais aucun doute n'était possible. Celui auquel j'aspirais depuis toujours.

Chaque parcellIl était là.

Debout, statufié, figé dans cette lumière impersonnelle et blafarde des néons de ce magasin pour hommes.

ICelui auquel j'aspirai depuis

Un devoir, une nécesse de mon corps le reconnaissait, s'ouvrait pour le recevoir, fleurissait pour lui rendre grâce, le séduire.ité absolue.

Un visage fermé, brun, une barbe qui recouvrait déjà ses mâchoires impressionnantes, une chemise blanche et des plis attendrissants, un costume classique anthracite.

Et surtout une cravate étroite, discrète, en soie noire à pois discrets qui enserrait un cou mince, rehaussait sa pomme d'adam qui saillait avec autorité.

 

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Une envie irrépressible de me jeter sur lui, de dénouer maladroitement cette cravate, de le délivrer partiellement de ces atours de séducteur, de lui déclarer la guerre en lui mordillant son menton à l'ombre naissante, de le faire chuter, de m'emparer de sa bouche d'homme, de m'imprégner de son odeur masculine, de me rouler dans ses bras.

Le violenter, le laisser me dominer, me tirer les cheveux, m'obliger à le regarder dans les yeux, soupirer sous ses mains épaisses aux ongles carrés.

Tout en lui respirait une virilité policée, maîtrisée, une animalité assumée prête à se déchaîner.

J'anticipai ses morsures lupines et son souffle dans mon cou. Je tremblais de convoitise, griffant nerveusement l'épaulette du costume que je tenais à la main, ne sachant où me dissimuler pour échapper à son regard fixe, à mon envie impudique.

Comme souvent je me suis retrouvée dans ce magasin de costumes pour hommes,  attirée comme une pie lubrique par les étoffes exposées, obsédée par l'érotisme singulier des cravates nouées aux cous des mannequins de celluloïd.

Des bouts d'étoffe moirées, quadrillées,hachurées, aux textures veloutées, lisses et fluides comme la soie, nervurées ou pelucheuses  comme la laine du tricot.

Je les aimais toutes  et j'adorais venir les caresser en catimini, les enrouler autour des doigts, les faire couler sur mes mains comme de l'eau figée, effleurer de leur pointe mon visage, me caresser la lèvre supérieure.

De simples morceaux de beau tissu assemblés pour embellir les hommes, leur assurer prestance et dignité.

Fétichiste inavouée, le simple fait d'apercevoir un homme cravaté suffisait à m'étourdir. Une excitation diffuse, un plaisir discret, une faim charnelle qui gronde.

Je perds le fil de la discussion, je ne peux achever mon propos. Je suis des yeux l'heureux possesseur de l'attribut, souvent interchangeable, ayant subitement l'immense mérite d'assumer sa virilité, de la mettre en scène avec l'élégance d'un seigneur.

Un univers raffiné, codifié, classique qui sent le cuir et la cire, un monde classique qui échauffe mes esprits, m'entrouvre les cuisses.

Les hommes de la famille se sont toujours parés de cette bande de tissu que certains ridiculisent et assimulent à un substitut phallique.

Un serpent miroitant et domestiqué qui s'enroule autour du cou pour descendre en ligne droite et de reposer sa tête sifflante sur le nombril de son maître, en effleurant la boucle de sa ceinture.

J'aime regarder passer les hommes élégants, me délecter de leurs sourires qui s'évanouissent peu à peu.

J'aime entrer dans les boutiques de confection masculine, tripoter les vestes, caresser le tweed, me perdre dans le dessin des chevrons, apprécier l'épaisseur de la matière, vérifier la qualité des finitions, juger d'un air boudeur les coutures, prétexter chercher un habit pour mon homme resté à la maison qui déteste faire des emplettes.

Un aphrodisiaque urbain, un euphorisant journalier, un fantasme dans la routine.

Je me gave ainsi d'images, laisse courir mes mains sur les portants, attise les braises qui couvent dans mon ventre, engrange assez de sensations pour le soir m'abandonner au plaisr, dans l'intimité de ma chambre.

Aujourd'hui je m'adonne de nouveau à ma douce perversité. Je sors les porte-manteaux, les regarde en faisant la moue avant de les reposer avec ostentation , écoutant le délicieux cliquetis du déni, du refus catégorique avant l'oubli définitif du modèle écarté.

Il est là. Tout simplement.

Il ne bouge pas.

Il a deviné mon petit jeu. Il n'appartient pas au magasin.

Il est là. Il sait déjà tout de moi. Il me veut.

Je le veux aussi. Sa bouche, son corps, son être, son sexe dans le mien.

Mes mains sur sa cravate...

 

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Elle est là.

Debout, ses petites mains plongées fébrilement dans les costumes, le front soucieux, les joues rouges, émue, comme prise en défaut, voleuse d'émotions.

Excitante.

Tellement excitante dans la lumière artificielle de ce magasin pour hommes.

Elle est là. Celle à qui j'aspirai depuis toujours. Je ne la connais pas mais aucun doute n'est possible.

Mon corps la reconnaît, se tend vers elle pour la prendre, pour la célébrer.

Un devoir, une nécessité absolue...

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